Les investisseurs répondent à Iwata

La semaine dernière, Nintendo a eu la lourde tâche d'annoncer de bien mauvaises nouvelles aux investisseurs, qui s'ils peuvent être rassurés de voir leur dividende 2012 protégé par Nintendo, peuvent toutefois être inquiets des perspectives à long terme de l'entreprise.

Eurogamer a eu la bonne idée d'interroger ces investisseurs, afin de recueuillir leurs impressions après le déluge de mauvaises nouvelles communiqué par Nintendo. Cette info vous permettra de retrouver les propos de Michal Pachter, Pierce Harding-Rolls de Screen Digest et Billy Pidgeon de M2 Research.

Commençons avec l'analyste que l'on adore détester, Michal Pachter, qui semble jubiler de la situation actuelle avec ses "je vous l'avais bien dit" :

Pour Nintendo, oui, les choses vont vraiment très mal. Nintendo a commencé ce cycle avec une position dominante sur le segment portable, et a fait le choix de ne pas concourir avec la XBox 360 et la PS3 sur les graphismes. Ils ont pu confirmer leur domination portable, et leur choix de ne pas être en concurrence avec la XBox 360 et la PS3 a marché, et cinq ans plus tard, ils sont dominants à la fois sur console et sur portables. Néanmoins, leur intérêt a périclité, avec la prolifération des iPods et des smartphones, et avec les consoles haute-définition qui ont dépassé la Wii.

J'avais demandé une Wii HD en 2009 et encore en 2010 parce que j'avais vu tout cela venir. J'avais assez de respect pour le management de Nintendo pour croire qu'ils avaient eux aussi vu les choses comme moi je les avais vues. Il est clair qu'il ne partageait pas ma vision des choses, et le bilan semestriel et les prévisions largement à la baisse sont la conséquence de leur décision de reste dans la course de l'océan bleu au lieu d'aller concourir dans l'océan rouge. Malheureusement, les résultats de cette semaine montrent que l'océan bleu de Nintendo n'est plus bleu : les requins ne se contentent plus de tourner en rond, il dévorent tant qu'ils veulent la part de marché de Nintendo.

J'ai déjà dit que l'iPod Touch et l'émergence des smartphones avait permis de délivrer des jeux cimples et amusants aux masses, grignotant la cible de la DS. Cela a clairement eu lieu, comme l'a prouvé la baisse des prévisions de ventes de consoles DS et la forte baisse des prévisions de ventes de jeux DS/3DS. Il est assez clair maintenant que le potentiel des portables Nintendo est moins important maintenant qu'il ne l'était lorsque la DS est sortie, et les ventes de jeux vont continuer à souffrir, dans la mesure où la valeur des petits jeux sur consoles portables a beaucoup baissé avec l'émergence des jeux gratuits à jouer et des jeux à 99 cents sur iPods et smartphones.

La Wii U va soit bien marché rapidement, forçant Microsoft et Sony à accélérer les lancements de leurs propres nouvelles machines, ou bien va se vendre modestement, permettant aux concurrents de Nintendo de lancer leurs machines plus tard.

L'analyste de Screen Digest Piers Harding-Rolls a quant à lui confié :

Il est trop tôt pour faire le chant du cygne de la 3DS. Ce Noël nous en dira plus et sa performance au cours des deux prochains mois sera aussi essentiel pour convaincre les éditeurs-tiers d'augmenter leurs investissements sur la console. A présent, beaucoup d'éditeurs ont opté pour une position d'attente, et même avec un Noël très bon, je ne vois pas d'investissement 3DS majeur avant la fin 2012.

Tant la 3DS que la Wii U innovent, mais aucune des deux pour le moment n'a le potentiel auprès du grand public que leurs prédécesseurs. Ajoutez à l'équation la concurrence d'appareils généraux connectés et le business de Nintendo a soudain l'air beaucoup moins robuste qu'au plus fort de la popularité de la Wii. Avec la 3DS qui n'arrive pas à se vendre, la société a du revoir le prix à la baisse : cela aura un impact sur d'autres coûts internes pour compenser la marge perdue ici.

Cela pourrait vouloir dire une réduction des dépenses en R&D ou peut-être une baisse des investissements en développement de contenu sur ses produits. Nintendo devrait trouver en 2012 un challenge où il attend la sortie de la Wii U pour voir les ventes repartir. La force du Yen face au dollar a amplifié la situation.

Billy Pidgeon, de M2 Research, a expliqué :

Les baisses des ventes de 3DS et de Wii étaient attendues. La force relative du Yen face au dollar et à l'Euro sont ici les vrais facteurs. Malheureusement, le facteur économique négatif d'un Yen fort va continuer à faire souffrir Nintendo et d'autres sociétés japonaises dépendantes des marchés américains ou européens. La pression est sur la Wii U.

La Wii et la DS vont continuer à perdre du terrain, Nintendo a donc besoin d'une bonne popularité de la Wii U avec un bon attach-rate (ndlr : le nombre de jeux vendus par console). La Wii U ne devrait pas arriver à renouveler la performance de la Wii, mais l'attach-rate devrait être meilleur si assez de jeux de qualité sont disponibles pour une base d'utilisateurs plus petite mais aussi plus enthousiaste.