Marque Wii : chronique d'un défi réussi

I. Wii, symbole d'une rupture

1. Les marques de Nintendo : un positionnement ayant peu évolué

L’étude des différentes marques de consoles lancées par Nintendo depuis les années 70 révèle une certaine homogénéité dans le choix des noms. Un rapide récapitulatif des principales marques lancées par la société Nintendo depuis son entrée sur le marché des jeux vidéo est éloquent :

• Nintendo Entertainment System
  
• Nintendo 64
  
• GameCube
  
• GameBoy
  
• Nintendo DS

Comme on peut le voir, tous les noms de consoles font intervenir soit le nom de la société, soit le terme « Game ». Par ailleurs, la consonance anglo-saxonne – systématiquement présente - de tous les noms de consoles ne porte pas une réelle dimension d’universalité de la marque. Si l’on s’en tient à leur nom, les machines semblent essentiellement réservées à un public de passionnés, à des « hard-core gamers ». Nombreux dès lors sont ceux qui ne se sentent pas du tout attirés par ce monde du jeu vidéo qu’ils jugent parfois inaccessible, trop compliqué. Les noms accentuent cette impression d’un produit réservé à une catégorie particulière de clients, en grande majorité des garçons et des jeunes adultes, sensibles au « hype » qu’inspire l’utilisation de la langue anglaise.

Nintendo ne fait ici que contribuer à un usage du secteur. Les consoles de Sony et de Microsoft affichent tous une sonorité anglo-saxonne et n’apportent aucune originalité d’une génération à l’autre (de la Playstation à la Playstation 3, de la Xbox à la Xbox 360).

2. Evolution du nom : une Revolution temporaire

Avec la Wii, Nintendo a donc rompu avec les habitudes. Pourtant, à l’origine, la Wii ne devait pas s’appeler Wii, mais bien « Revolution ». Nintendo entendait en effet révolutionner le marché actuel du jeu vidéo, et ce nom leur semblait à la hauteur de leur ambition. Il s’agissait aussi de susciter l’excitation des joueurs, puisque rien n’avait été encore divulgué sur les innovations radicales du nouveau produit. Le nom de code « Revolution » donnait donc lieu aux plus impressionnantes extrapolations sur ce que pouvaient bien justifier une telle appellation. Nintendo voulait susciter un buzz et c’était réussi. Mais « Revolution » n’avait jamais été envisagé comme le nom définitif par les hautes pontes de la firme.


Et justement, en avril 2006, à deux semaines de révéler l’ensemble des innovations de sa nouvelle console lors d’une conférence exceptionnelle au salon mondial du jeu vidéo, Nintendo annonce le nom officiel : Wii. Pourquoi ne pas avoir attendu la fameuse conférence pour révéler la nouvelle marque phare, conjointement avec le hardware ? En réalité, Nintendo ne voulait pas que cette annonce occulte les innovations de sa console. C’est le risque lorsque la marque devient plus forte que le produit qu’elle nomme : qu’elle occulte les qualités du produit en lui-même. A titre d’illustration, c’est ce qui a pu se produire dans une moindre mesure avec Vaio, la marque informatique de Sony, qui jouit d’une notoriété remarquable mais qui peine à se concrétiser en un succès commercial. Nintendo veut à tout prix éviter que le marque ne monopolise les esprits aux dépends des spécificités de sa console.

Bien sûr, la firme japonaise s’attendait à de fortes réactions, et ce délai de deux semaines devait permettre à la pression de redescendre, afin de pouvoir dévoiler les innovations de manière sereine.

3. L’annonce délicate du nom

Fait notable, l’annonce du nom avait donné lieu à l’envoi d’un communiqué de presse de la part de Nintendo, afin d’expliquer le pourquoi du comment d’une telle bizarrerie. Voici le communiqué de presse français :